Par Victor Beaudet-Latendresse

Avant cet été, je n’avais jamais mis les pieds au Chili. J’avais par contre eu le privilège d’avoir voyagé à plusieurs reprises en Amérique latine et en Amérique centrale. J’ai habité au Panama et en Argentine, j’ai voyagé au Brésil, en Colombie, au Pérou, bref j’arrivais au Chili avec un certains bagage qui me faisait croire avec beaucoup de naïveté que je commençais à comprendre ou au moins à me familiariser avec plusieurs des éléments culturels et politique que plusieurs pays d’Amérique latine partagent. Or, cet été, je me suis fait prouver tout le contraire. Insaisissable, l’Amérique latine m’a encore bouleversé.

En 2010 Alain Rouquié écrivait dans son livre À l’ombre des dictatures : « essayer encore, rater encore rater mieux » pour décrire le parcours tragique de plusieurs pays d’Amérique latine. Je crois que cette phrase représente aussi mon expérience avec ce magnifique continent. Chaque fois que j’y retourne j’arrive avec une plus grande confiance, chaque fois je suis renversé et la prochaine fois ce sera encore mieux!

Les droits des personnes en situation de handicap et la crise climatique

L’ONG Inclusiva, dans laquelle j’ai eu la chance de travailler, est une une organisation spécialisée dans l’intégration de la dimension de la discapacidad dans la gestion des risques de catastrophes. Cette organisation œuvre pour un monde inclusif en adoptant une approche communautaire, systémique et globale, à travers des actions concrètes qui allient discours et actes afin de promouvoir le respect des droits, de l’autonomie et de la dignité des personnes en situation de handicap dans la gestion des risques.

La crise climatique est une menace existentielle pour les humains. Par contre, nous ne sommes pas tous égaux face à ces conséquences potentielles. La multiplication des catastrophes climatiques entraîne chaque année des catastrophes humanitaires, mais lorsqu’on regarde dans le détail on observe que le taux de mortalité des personnes en situation de handicap est disproportionnellement plus élevé lors de catastrophes naturelles et d’événements météorologiques extrêmes. Effectivement, Les personnes en situation de handicap subissent des taux de mortalité et des dommages disproportionnés lors de vagues de chaleur, de cyclones, d’inondations, de sécheresses, de famines, ect…

Cette vulnérabilisation des personnes en situation d’handicap est le résultat d’un manque d’adéquation de la réalité des handicapes avec les mesures de prévention aux catastrophes climatiques, d’urgence et de réhabilitation. C’est donc dans cette optique que plusieurs instruments du droit internationale comme la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques de Paris reconnaissent que les personnes en situation de handicap sont davantage exposées aux effets négatifs du changement climatique. En plus des nombreux obstacles sociaux et économiques auxquels font fasse les personnes en situation d’handicap qui marginalise ces individus du reste de la société, l’inclusion de leur réalité aux efforts d’adaptation aux changements climatiques demeurent un véritable défi lié à l’invisibilisation de la réalité de ces personnes.

Avant de travailler avec Incluvisa, je n’avais jamais travaillé avec des personnes en situation d’handicap ni à la défense de leurs droits. J’ai découvert une communauté soudée dont la réalité est trop peu connue. Effectivement, lorsqu’on parle des droits des personnes en situation de handicap, on peut avoir l’impression de parler d’une petite population touchée, mais au Chili, ce sont 3 291 602 personnes,14,7% des enfants et adolescents et 17,6% des adultes présentent une forme de handicap.

Nous sommes tous et toutes affectées par les changements climatiques. Si ce n’est pas déjà le cas, nous le serons assurément dans un avenir proche. La leçon la plus importante que j’ai apprise cet été est que nous sommes tous vulnérables face aux changements climatiques, mais certaines populations sont vulnérabilisées par les politiques mises en place. Il est indéniable qu’il existe un lien entre les droits humains et le changement climatique, notamment lorsque ce dernier, par ses conséquences (pollution de l’air, dégradation des sols, perte de biodiversité, pénurie d’eau et pollution chimique…) porte atteinte au droit à la vie des personnes en situation de handicap menacées par l’augmentation de la faim et les destructions causées par les phénomènes climatiques extrêmes.

Le retour à la réalité

Maintenant que je suis de retour à Montréal, ça sent la rentrée à plein nez. Les cours recommencent tranquillement, mon agenda commence à se remplir trop rapidement de cases de différentes couleurs, le travail recommence. Je sens que la vie « normal » reprend le dessus sur l’expérience incroyable que j’ai vécu cet été. J’essaie de ne pas me laisser remplir le cœur et les yeux de nostalgie, mais plutôt de gratitude. J’ai eu une incroyable chance d’avoir vécue cette expérience et je conserverai toujours une petite partie de celle-ci avec moi.

De manière récurrente dans les médias ou dans l’actualité, l’Amérique latine est présentée comme un continent en constante ébullition, comme un volcan au bord de l’éruption. Mais malgré des contextes socio-politiques parfois difficiles, je reviens toujours plus paisible que je ne suis partie de nos voisins du sud. J’ai déjà hâte à ma prochaine excursion en Amérique latine et à retrouver ce continent indomptable que je ne cesserai jamais d’apprendre à connaitre.

¡Hasta la próxima América latina!

¡Viva Chile!